Loi de finances pour 2021 : adaptation de la taxe d’aménagement en faveur du « zéro artificialisation nette »
La loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021, prévoit dans son article 141 trois séries de dispositions concernant la taxe d’aménagement.
– une mesure visant à affecter la part départementale de la taxe d’aménagement aux opérations de renaturation ;
– une deuxième mesure concernant le stationnement ;
– et une troisième mesure allégeant les conditions de motivation de la taxe d’aménagement à taux majoré.
Nous nous intéresserons plus particulièrement aux deux dernières.
Allègement de la taxation des parkings intégrés à la construction
La mesure concernant le stationnement vise à alléger la taxation des parkings intégrés à la construction. Il s’agit de ne pas pénaliser fiscalement ce mode de stationnement qui ne consomme ni n’imperméabilise pas plus d’espace que la construction à laquelle il est intégré ; et ce dans un plan vertical, ce qui exclut les parkings attenants à la construction.
Cette préoccupation n’est pas nouvelle puisque les collectivités pouvaient déjà adopter des exonérations pour ce mode de stationnement. Mais seulement 3% des communes y ont procédé.
Ainsi, la liste des exonération de la part communale fixée à l’article L 331-7 du code de l’urbanisme se voit complétée d’un 10° concernant cette nouvelle exonération.
On notera que cette exonération portera également sur la part départementale et la part régionale de la taxe d’aménagement, l’article L 331-8 c. urb. visant désormais ce 10° point.
Cette exonération aura un impact fiscal très fort. Prenons un exemple, tiré d’un cas réel, d’une VEFA de 39 logements avec un taux communal de 5 %, un taux départemental de 1,3% et un taux régional (Ile-de-France) de 1% ; Avec 5 031 m² de surface de plancher taxable ; dont 1 578 m² de parkings en sous-sol, qui seront donc exonérés à compter du 1er janvier 2022.
Un tel projet paiera 198 850 € de taxe d’aménagement dans le régime actuel ; alors qu’il ne paiera plus que 120 669 € après l’entrée en vigueur de l’exonération (à valeur forfaitaire constante). Près de 80 000 euros d’économies pour le promoteur, … et une perte de près de 54 000 euros pour la commune.
… il y a fort à parier que nombres de PC seront quelque peu différés fin 2021 !
Signalons que cette réduction de la surface taxable a pour effet de faire jouer à plein l’abattement de 50 % pour les résidences principales de moins de 100 m², ce qui n’était pas le cas auparavant. En effet, l’intégration des parkings dans la surface taxable a pour effet de dépasser le seuil moyen des 100 m² et donc d’avoir une partie de l’immeuble taxable à 100 %, ce qui provoque un effet levier important.
Dans le nouveau dispositif, dès lors que la moyenne des logements sera inférieur à 100 m² (ce qui est généralement le cas), c’est l’intégralité du projet qui sera taxée à 50 %.
Allègement de la motivation de la taxe d’aménagement à taux majoré
La troisième mesure introduite par la loi de finances pour 2021 en matière de taxe d’aménagement consiste à faciliter la tâche des collectivités qui souhaitent majorer la taxe d’aménagement. Rappelons qu’une obligation de motivation pèse sur elles dès lors qu’elles souhaitent dépasser le taux de 5 % et le porter jusqu’à 20 %.
L’exposé des motifs figurant sous l’article 43 du projet de loi indique que « La législation actuelle prévoit en effet la démonstration de la stricte proportionnalité du taux appliqué au service rendu, qui est techniquement difficile à établir ».
La Communauté Urbaine du Grand Toulouse en a d’ailleurs récemment fait les frais. L’affaire concernait un immeuble de bureaux comprenant un restaurant d’entreprise pour une surface totale de 1 906 m². Le taux de la taxe d’aménagement, majoré à hauteur de 16 %, portait le montant de la taxe d’aménagement à 254 300 €.
Le Conseil d’Etat a constaté que la délibération instaurant la majoration n’indiquait pas en quoi ce » taux était proportionné au coût des travaux de voirie ou de création d’équipements publics rendus nécessaires en raison de l’importance des constructions nouvelles édifiées dans les secteurs en cause ». Ce faisant, il a cassé la décision du tribunal administratif qui avait conclu à la validité de la majoration. CE 09/11/2020, N° 432285 .
Cet arrêt est rendu sur le fondement de l’article L 331-15 du code de l’urbanisme, qui moins de 2 mois après la décision de la Haute Juridiction, est modifié par la loi !
Les élus locaux s’en féliciteront.
Les contribuables (en ce compris les acquéreurs finaux) apprécieront que l’on puisse faire peser sur eux une charge fiscale 4 fois supérieure à celle de leur voisin sans que l’on soit en mesure de leur expliquer pourquoi !
A signaler également (cf. exposé des motifs du projet de loi de finances) :
– le paiement de la taxe d’aménagement n’interviendra plus en deux fractions égales (12 mois puis 24 mois après le permis de construire) ; l’exigibilité sera rattachée à l’achèvement de la construction (art. L 331-27 c. urb.). Le premier titre de perception devra intervenir dans les 90 jours de l’exigibilité ; et le second six mois plus tard.
– le transfert de gestion intégral de la taxe d’aménagement de la DDT à la DGFIP .
Pour en savoir plus : Rapport du Sénat